Association BPSGM Les Basses Pyrénées dans la seconde guerre mondiale 64000 Pau
LAULHE Benoit. Résistances C.F.P. 63: LE BATAILLON CARRÈRE DANS LES COMBATS DE LA LIBÉRATION (JUILLET 1944).
LE BATAILLON CARRÈRE DANS LES COMBATS DE LA LIBÉRATION (JUILLET 1944).
Benoit LAULHE – La Résistance dans les Basses-Pyrénées – Master U.P.P.A. – 2001 –
Fiche n°63.
LE BATAILLON CARRÈRE DANS LES COMBATS DE LA LIBÉRATION (JUILLET 1944).
La phase de mobilisation de la résistance et de préparation des opérations étant terminée, les Allemands réagissent très durement et violemment contre les troupes du Corps franc Pommiès.
Après avoir subi de lourdes pertes lors des opérations de contre guérilla nazies ou lors des combats involontaires, les compagnies du bataillon de Carrère préparent des embuscades et des » coups de force » dans tout le département. Harcelant l’ennemi où qu’il se trouve en Béarn et Soûle, les chasseurs du Corps franc Pommiès s’engagent ainsi dans une lutte et un combat qui ne cesseront qu’à la libération, nombres d’entre eux payant entre temps de leur vie ce patriotisme et ce dévouement.
Ayant pour mission de contrôler les axes sud et ouest de la préfecture béarnaise tout en isolant la garnison de cette ville, le bataillon de Carrère du C.F.P. souffre rapidement d’un manque d’effectif et de matériel, ainsi que des nombreuses opérations de contre guérilla allemandes. Eparpillées et affaiblies, les quatre compagnies et le groupe de destruction tentent malgré les nombreuses arrestations de réagir. L’exemple et l’attitude du groupe Mercier reste à ce niveau exemplaire.
Ses premiers attentats contre les voies de communication et le dépôt de locomotive de Pau le 4 juillet 1944 (au lendemain de la mobilisation) réalisés, cette unité subit en effet plusieurs coups durs : Le chef Mercier doit tout d’abord quitter prématurément le groupe après un accident. C’est son remplaçant, Jean Darrigrand, qui assure la direction de la section avant de se faire à son tour arrêter lors de l’élimination d’un membre de la Gestapo le 11 juillet. Peu de temps après, les frères Liquet et le chasseur Latusque sont capturés et emprisonnés à leur tour lors d’une opération de sabotage. Diminué, ce groupe maintient malgré tous ses opérations de harcèlement, plusieurs attentats semant peu de temps après encore plus de trouble chez un ennemi déjà sous tension.
Cette évolution de la situation se répercute par la suite sur l’activité des autres compagnies. Ainsi, le groupe Vernet, présent dans la zone montagneuse de Capbis après les nombreux combats qui l’ont affaibli, tente de tenir sa position malgré les conditions difficiles de survie (notamment atmosphérique), mais surtout les attaques allemandes toujours plus dangereuses. Ces dernières, après un assaut qui coûte la vie à un chasseur fin juin, obligent cette compagnie à gagner un secteur de haute montagne, près du pic de Monbula (1583 m). Sous la pression continue des ennemis, les moindres déplacements deviennent alors périlleux. Les combats « involontaires » (mort de Cébrian), les dénonciations (Sénéchal, Munz, Eschaas-Tourné) et les arrestations lors de permissions (Saint-Laurent, Lagoarre) affaiblissent ainsi considérablement l’unité.
Face à ce problème, Vernet décide dans un premier temps de démobiliser la partie la plus faible et la moins équipée de ses hommes, tout en déplaçant l’ensemble du groupe vers Coarraze-Nay où les conditions de vie sont plus supportables, le ravitaillement, mais surtout l’aide de la population, plus important. Cependant, fin juillet, après une longue période de calme du maquis, la menace de l’ennemi retombant un peu, le commandant de la compagnie rappelle ses hommes et les regroupe dans la région d’Arthez-d’Asson. Réarmée et restructurée, cette unité lance alors une série d’embuscades en particulier sur la Nationale 134 (axe Pau–Oloron), à Haut-de-Gan, le 29 juillet, à Gan, quelques jours plus tard, à Rébénacq, le 4 août, l’ennemi subissant à chaque opération de nombreuses pertes en hommes et matériel.
Pour la compagnie Gény, l’évolution durant cet été 1944 est à peu près similaire. Moins exposée que le groupe Vernet, l’unité tient un bois près de Lacommande. Cependant, réduite à un seul secteur, cette compagnie ne peut qu’être discrète et attendre une nouvelle mobilisation générale qui lui permettrait de se lancer dans des opérations plus importantes.
Malgré ses précautions et sa faible activité, comme pour les autres unités, début juillet, la compagnie subit de nombreux coups durs. Le premier et sûrement plus important intervient le 7 juillet lorsque le chef Gény, revenant du P.C. de bataillon, est tué après s’être heurté à un barrage allemand près de Monein. Comble de malchance, quelques heures plus tard, un autre camion du Corps Franc Pommiès est détruit à ce même niveau, cinq chasseurs étant tués. Le chef de la compagnie décédé, c’est le capitaine Peillon (un des cadres à l’origine du bataillon des Basses-Pyrénées), absent depuis février 1944, qui reprend le commandement. Déplaçant son poste de commandement de Lacommande à Arnos, il ne peut empêcher la série noire de continuer : le 18 juillet, deux chasseurs en permission sont arrêtés, le 20, le nouveau cantonnement est attaqué après dénonciation (l’assaut final fait deux morts chez les résistants).
Refusant la démobilisation totale, Peillon engage alors une stratégie d’attaques et d’attentats. Le premier se déroule le 29 juillet et vise un petit convoi allemand à Mont, sur l’axe Pau-Bayonne, dans lequel deux ennemis sont tués, quatre blessés étant par la suite relevés. Le 9 août, avec quinze chasseurs, il attaque à Argagnon, sur la R.N. 117, un camion de munitions allemand faisant quatre morts. Le 10, c’est en association avec la section du gendarme Mareau, de Thèze, qu’une embuscade au pied de la côte d’Auriac, sur la route de Bordeaux, est tendue. Menée par six hommes, elle entraîne le décès de cinq Allemands et la mise hors combat de six autres.
Multipliant ainsi les coups d’éclats avec en parallèle une grande activité de recrutement, cette compagnie arrive à la veille de la libération avec trois sections bien entraînées et bien équipées, prêtes à entrer massivement en action.
Il en est de même pour la compagnie Henry. Basée au nord de Pau avec une section au sud de Lembeye et une autre dans la région de Bougarber, elle ne peut en effet avec les faibles effectifs dont elle dispose que lancer quelques rares attaques isolées contre l’occupant (31 juillet, trois morts à Castaignos) en attendant « l’assaut final ».
Cependant, l’une des zones les plus actives mais aussi les plus dangereuses pour la résistance reste la Soûle. Quadrillée et contrôlée par la compagnie Lavalou (ex- compagnie Bèguerie), sous la responsabilité dans le cadre de la « zone des Pyrénées » du chef de Rougemont, cette région dispose en effet d’effectifs relativement importants avec une compagnie sous les ordres du chef Bercut, une équipe de sabotage dirigée par M Garrigue, une section de parachutage (M Parizet) et une section de recrutement confiée à Galtier d’Auriac (soit au total une cinquantaine d’hommes).
Bien encadrés et entraînés, ces volontaires se montrent rapidement offensifs en attaquant, dès le 26 juin par Lavalou et Bercut (aidés de quelques hommes), le central téléphonique de Salies de Béarn. Toutefois, les Allemands eux aussi très nerveux dans cette zone, lancent aussitôt plusieurs opérations de contre guérilla. Les nombreux affrontements involontaires amènent Lavalou à déplacer son PC vers Esquiule. Le 9 juillet, les Allemands repartent à l’assaut de cette compagnie. Le drame cette fois-là est évité de justesse par la mise en garde et l’avertissement du docteur Sehabiague de Mauléon. Le même jour, après la fuite, c’est fortuitement qu’un combat s’engage après la rencontre d’un convoi ennemi et d’un groupe de résistants. Le bilan de ce choc sera d’un disparu dans les rangs du C.F.P. (ce chasseur ayant été fait prisonnier). Plusieurs autres alertes affaiblissent ainsi la compagnie Lavalou : arrestation au domicile de Galtier d’Auriac, interpellations lors de contrôles effectués sur des barrages à Sauveterre-de-Béarn.
Cependant, mi-juillet, la compagnie se faisant plus discrète, les troupes de répression allemandes qui tenaient Mauléon quittent la région, laissant en ville une petite garnison de cinquante hommes. S’associant à l’A.S. (Armée Secrète) de MM. Jauréguiberry et Hegoburu (qui n’acceptent que de contrôler les grands axes), le Corps franc Pommiès se prépare à l’attaque. Le 10 août avec les informations du docteur Séhabiague et du pharmacien Goux, M Lavalou apprend que le contingent nazi quitte la ville avec trois camions.
Positionnant ses hommes près d’un pont routier enjambant la voie ferrée, Bercut prépare l’embuscade. Cette dernière éclate vers treize heures, immobilise les ennemis et oblige ces derniers à se replier et à se barricader dans le château Etchebart tout proche. Après de longues négociations, la garnison finit par se rendre, les quarante-six prisonniers étant emmenés par la suite vers une bergerie en montagne et confiés à l’A.S.
Toutefois, si après cette victoire la ville fête la libération, cette dernière n’est que de courte durée puisque le 12 août, une importante colonne ennemie est signalée par la brigade de gendarmerie de Navarrenx. Réoccupée, la ville et la population ne sont cependant pas touchées par les représailles, la libération effective pour la cité se déroulant le 16 août avec le départ définitif de la Wehrmacht.
En occupant la zone sud du département, le bataillon de Carrère connaît entre fin juin et début août 1944, à travers l’activité de ses compagnies, une grande période de doute. Après avoir subi, assez lourdement dans un premier temps, les arrestations et les opérations de contre guérilla allemandes, les chasseurs réussissent cependant, par la suite à se ressaisir et à mener à bien une vague d’attaques et d’actions de harcèlement.
Phase de tous les dangers, cette période aura donc été pour ce mouvement de résistance aussi inquiétante qu’utile, les chefs de l’armée de l’ombre ayant tiré de nombreux enseignements des erreurs, des faiblesses mais aussi des forces de leurs troupes.
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