Association BPSGM Les Basses Pyrénées dans la seconde guerre mondiale 64000 Pau
LACLOTTE Albert
Albert LACLOTTE
Moncaup. (près de Lembeye)
Témoignage recueilli en mars 2012.
Né en 1923.
Moncaup est une petite commune béarnaise à l’habitat dispersé située entre Lembeye et Maubourguet dans un paysage de collines fortement marqué, où alternent bois et maïs, à l’écart des grands axes. On pourrait se croire à l’abri des grands événements du monde.
La ferme des parents de M. Albert Laclotte est, en 1940, une propriété de 15ha environ : bois, maïs et vignes. Située sur une colline à 3km de l’église. Bel exemple de l’habitat rural traditionnel disposé en plusieurs bâtiments imposants autour de grands chênes.
Le père de A. Laclotte a fait la guerre 14/18. Le témoin ne note pas d’engagement politique particulier si ce n’est un certain sentiment anti-allemand propre aux anciens combattants. En 1940, avec son père, il travaille sur la ferme qu’il est appelé à reprendre.
Comme d’autres jeunes voisins, il part aux chantiers de jeunesse dans le Lot et Garonne à Barbaste, sans doute en 1942. Il y travaille le bois, taillant des piquets de mine envoyés en Allemagne. Ils sont 85, leur état d’esprit est anti-allemand, anti-Pétain. Leur chef d’équipe de même.
Avec d’autres camarades, il apprend en 1943 qu’ils vont devoir partir en Allemagne dans le cadre du S.T.O. Refusant ce risque et sachant qu’ils peuvent se cacher dans les campagnes écartées de leurs villages, ils profitent d’une nuit pour s’évader. Il part avec 4 jeunes de la région, et ils mettront 5 jours pour rejoindre Moncaup.
Albert Laclotte va se cacher pendant plusieurs jours dans une dépendance de la ferme. Les gendarmes le cherchent. Il est déserteur. Une nuit, la famille va surprendre des maquisards locaux en train de se ravitailler dans le jardin de la ferme. Ce fait sera l’occasion pour A. Laclotte de prendre contact avec des résistants et de les rejoindre dans les jours qui suivent dans le maquis local. Il n’a pas de souvenirs d’actions organisées particulières. Il parle d’un groupe de jeunes gens faiblement armés, cachés dans les bois autour de Moncaup. Ce maquis aurait été dénoncé par des jeunes filles à la suite de rivalités pour les garçons. Les maquisards sont avertis de la trahison par certains gendarmes de Lembeye. Lui, réfugié dans une ferme à Aurions-Idernes est ravitaillé par un adjudant de gendarmerie de Lembeye. C’est là qu’il rencontrera sa future femme, fille du maire d’Aurions, entrepreneur et fermier.
Albert Laclotte s’enfuit une nouvelle fois et, par relation, rejoint le maquis de Sombrun, groupe des Hautes Pyrénées, organisé, armé, impliqué dans différentes actions et dont l’histoire est évoquée dans le livre de M. Cubéro ( Histoire des Hautes-Pyrénées pendant la deuxième guerre mondiale). Ils sont environ 48, commandés par un capitaine.
A. Laclotte a alors 20 ans. Parmi les dirigeants de ce maquis, Jean Cazenave dit « le Bison ».
A la suite d’une dénonciation évoquée par M. Cubéro dans son livre, le maquis de Sombrun est assiégé par les Allemands. Certains maquisards sont tués, d’autres faits prisonniers et amenés à Tarbes, A. Laclotte réussit à s’échapper et à rejoindre les environs de la ferme familiale pour se cacher. Ce jour là, le village de Moncaup n’est pas inquiété.
Par contre, le 18 juillet, au matin, le village est occupé par une colonne allemande prévenue de l’existence de «terroristes » par un traître ayant infiltré le maquis. Nombre de maisons sont perquisitionnées en vain, les Allemands prennent en otage le maire et retiennent le père de M. Laclotte pendant 9 heures avant de partir avec toutes les bouteilles de la cave. Ce même jour, certains habitants de Moncaup ont vu 2 prisonniers traînés à travers le village, chaines aux pieds, à bout de forces.
Le lendemain, le 19 juillet 1944, un habitant découvrira au fond d’un ravin près de la maison des Laclotte les corps des deux jeunes prisonniers assassinés. Albert Laclotte accompagné de son père et d’un voisin remontent les corps des deux maquisards, alors non identifiés. Ils les placent dans une brouette où ils sont photographiés en présence de notre témoin (photos en pièces jointes). On saura plus tard qu’il s’agit de deux jeunes extérieurs à la région : Yves Jungenet et René Bareyre. Le maire et le curé sont prévenus. Le lendemain à 6 heures, ils sont ensevelis, le prêtre du village organise une cérémonie toute simple dans l’église du village dont l’anniversaire sera célébré un an plus tard .
Après cet épisode, le maquis de Sombrun étant dissous, les hommes ayant réussi à fuir partent dans différents maquis.
Albert Laclotte part dans les Landes puis rejoint le 81ème R.I. à Libourne. Là, il complète sa formation militaire en se spécialisant dans les transmissions, ils sont 2 radio.
Ils reçoivent les messages de Londres sur les parachutages, les missions, transmettent les ordres : faire sauter les ponts, les voies ferrées, etc..
Peu de temps après, il est dirigé vers Lyon où, dans un premier temps, il rejoint les rescapés du Vercors dans des groupes chargés de couper les communications allemandes en faisant sauter des ponts.
Quelque temps plus tard, son groupe fait la jonction avec les troupes françaises ayant débarqué en Provence et il est incorporé dans la 1ère armée sous le commandement du général Leclerc. A partir de ce moment, A. Laclotte, toujours dans les transmissions, ne participant pas aux combats les armes à la main, va suivre l’odyssée de cette armée. Il transmet les commandements à des agents de liaison en moto. C’est la campagne d’Alsace (moments très durs : Colmar, Strasbourg, Stuttgart), l’Allemagne puis l’Autriche : troupes d’occupation, 3 mois à Vienne. Il défilera sous les ordres de Leclerc le 14 juillet 1945 à Innsbruck.
Leclerc qu’il rencontre à plusieurs reprises et dont il vante l’humanité.
Il est démobilisé à Sant Anton en Autriche où il reste 3 mois en 1946.
La campagne militaire terminée, on proposera à A. Laclotte un engagement dans l’armée. Il le refusera pour reprendre la ferme familiale de Moncaup et se mariera en 1947. Après avoir été un temps chauffeur à la Maison du Paysan à Pau, il restera à la ferme de 1957 à ce jour.
Animé par la volonté de maintenir le souvenir des maquisards de la région et notamment celui des 2 jeunes gens exécutés à proximité de la ferme , il sera l’un des artisans de la construction et de l’animation du mémorial construit à cet effet. Jusqu’à ce jour, ce souvenir a été annuellement perpétué.
Cérémonie du souvenir (60ème anniversaire) en juillet 2004.
En fichiers attachés:
Hommage du curé Christiani lors de la cérémonie du 18 juillet 1945,
Poème écrit pour la cérémonie du 18 juillet 1994,
Discours prononcé par « Le Bison » lors de la cérémonie de juillet 2002,
Interview de Albert Laclotte enregistrée en mars 2012.
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