Association  BPSGM          Les Basses Pyrénées dans la seconde guerre mondiale         64000 Pau

RENAUD Michel.

photo jeune portrait

 

De 1940 à 1945 : la quête permanente d’un jeune homme pour la défense de la liberté. Précoce sentiment patriotique, caractère volontaire et courageux, jeu des circonstances. M. Michel Renaud : des Deux-Sèvres aux Basses-Pyrénées, des premières indignations à l’action résistante dans un réseau lié au S.O.E.

 

 

  • Milieu socioprofessionnel et motivations : Niort 1940/1942.

Michel Renaud est né le 5 janvier 1922 à Villiers-la-Plaine dans les Deux-Sèvres. En 1940, ses parents sont boulangers-pâtissiers à Niort.

Il apprend de sa famille patriotisme et sens du devoir. Son père est engagé volontaire à 18 ans en 1916. La famille est soudée : trois de ses oncles sont instituteurs, les vacances les réunissent tous. Dans l’entourage familial, il découvre ainsi l’horreur du premier conflit mondial : contact avec des grands blessés, gueules cassées, récits, valeurs morales.

L’enseignement qu’il reçoit conforte l’influence du milieu familial. Son instituteur est un grand blessé de 14/18. Il voit les premiers films sur la guerre projetés dans les écoles. Dans le secondaire, il est marqué par un professeur d’histoire, M. Charboneau, qui dénonce « Mein Kampf ».

C’est dans cette sensibilité particulière que M. Renaud vit les effets de la défaite à Niort en 1940. Au printemps 1940, c’est d’abord le «spectacle désolant » des réfugiés arrivant dans la région dans des conditions dramatiques. Après l’écrasement de la Pologne, il rencontre des officiers polonais qui partiront vers Saint-Jean-de-Luz. Enfin, en juin 1940, c’est les larmes aux yeux qu’un sentiment de détresse l’envahit à l’arrivée des armées du Reich. Les conditions d’occupation le révolteront aussitôt : couvre-feu, arrogance, réquisitions, contrôles d’identité.

En août 1940, un événement personnel « sauvage » selon son expression va le conforter définitivement dans sa volonté de lutter contre l’occupant : un officier allemand tire, sans raison apparente, sur la voiture que je conduisais accompagnant ma mère dans sa tournée de pain.

  • Premier engagement, premières actions à Niort (octobre 1940, janvier 1942).

Une rencontre en est l’occasion : celle d’un représentant de commerce fréquentant la pâtisserie où il travaille en apprentissage à Niort : M. Delage. Ancien combattant de 14/18, officier de réserve, celui-ci cherche à constituer un groupe pour répondre à l’appel du général de Gaulle et commencer à résister. Activités modestes mais déjà « acte de foi, prise de conscience » entre un très petit nombre de gens et extension du groupe par le bouche à oreilles contre la notoriété de Pétain couvrant « le lâche soulagement de l’armistice » : écoute de Radio Londres, réunions clandestines, consignes, impression et distribution de tracts, de journaux, graffitis…A ce stade, et malgré la réalité des dangers, M. Renaud regrette l’absence d’action véritable.

L’arrestation de M. Delage par la police allemande précipite l’action de M. Renaud à partir de janvier 1942.

Celle-ci va se faire dans la compréhension familiale (notamment avec celle de ses oncles) et avec l’accord de ses parents qui vont lui donner «un petit pécule ». Il a 20 ans !

 

 

  • Passage en zone sud dite libre avec l’intention de rejoindre l’Angleterre ou, au moins, l’Afrique du Nord. Peut-être au Maroc où il a 2 oncles enseignant à portrait jeuneCasablanca et Taza.

Février 1942 : 2 tentatives de passage en Espagne (Andorre et Soule), 2 échecs. « 7 mois de galère sans vrais contacts ».

Des contacts familiaux le conduisent à Ax-les-Thermes. Ses recherches le mettent en contact avec un passeur qui lui propose un trajet par l’Andorre. Malgré  le paiement d’une grosse somme d’argent, celui-ci le trahit.

Michel Renaud, pour une deuxième tentative, se replie sur une deuxième voie dont il est informé : le Béarn et la Soule : contact avec des passeurs, intégration dans un convoi, début de l’odyssée. Mais la surveillance renforcée de la montagne par la police allemande fait renoncer au passage.

  • Septembre, novembre 1942 : retour chez les parents et entrée dans l’armée d’armistice.
etat de service
Etat des services.

 

 

Le découragement pousse M. Renaud à revenir chez ses parents en zone occupée. Là, un ami, gendarme de son canton de naissance(Coulonges-sur-l’Autize), le décide à signer un engagement dans l’armée d’armistice au titre du 63ième R.A. Maroc. Nouvel échec : l’embarquement prévu à Marseille est supprimé. Dès lors nouvelle affectation, ici réalisée : Marmande 150ième R.I. Dans ce régiment, M. Renaud se lie avec un camarade, André Baradat, qui lui donne l’adresse de sa sœur à Dax.

 

 

  • A partir du 11 novembre 1942, occupation de la zone libre par les Allemands et dissolution de l’armée d’armistice, contraintes et nouvelle quête d’engagement.

En congé d’armistice, les papiers officiels de libre circulation lui permettent de revenir chez lui. Mais la convocation pour le S.T.O. l’attend. Fidèle à ses engagements, M. Renaud la refuse et profite de ses papiers pour gagner le seul contact proche de la frontière espagnole dont il dispose : Dax, la sœur de M. Baradat Mme Lasseriesse dite« Mme Henri ». Toujours dans l’espoir d’un passage futur.

  • Décembre 1942 : le choix définitif : la résistance plutôt que le passage.
ferme de Libe
Ferme de Libe

 

Le temps de trouver un passeur, Mme Lasseriesse envoie M . Renaud se cacher chez sa mère au Hameau de Pau pendant dix jours. Elle le rappelle ayant trouvé un contact sérieux : un agriculteur de Saint-Vincent-de-Paul, Georges Degos, de la ferme de Libe.

Là, M. Renaud va rencontrer Léonce Dussarat, le futur « Léon des Landes », responsable de réseau de résistance. Ce dernier lui propose une alternative : le passage en Espagne ou l’entrée dans son organisation de résistance. C’est cette dernière option que choisit M. Renaud.

 

  • Décembre 1942, août 1944 : l’action résistante en réseau lié au S.O.E.
  1. Les réseaux : cadre de l’action de Michel Renaud.

Le réseau de Léonce Dussarat dit « Léon des Landes ».

Léonce Dussarat, né à Dax le 26 juillet 1904, exploite avec un associé une quincaillerie d’une dizaine d’employés ; issu d’un milieu chrétien, proche des idées du parti social français du colonel de La Roque, d’un patriotisme intransigeant, il refuse la défaite. A la suite de son associé (Léon Baraille), il prend la direction départementale du réseau O.C.M. (Organisation Civile Militaire) de rayonnement régional sous la direction bordelaise de Grandclément. En même temps, il tisse des relations avec les autres réseaux déjà constitués (Alliance, Andalousie, Comète, Résistance P.T.T, fer…). Après la trahison de Grandclément (1943), l’organisation de Léonce Dussarat est directement rattachée au S.O.E (Spécial Organisation Service).

Le S.O.E. fondé en juillet 1940 par Wiston Churchill.

le soe manuscrit

 

Ce service britannique recrute des hommes et des chefs parmi les résistants locaux pour les armer, les entraîner, les rendre opérationnels dans la perspective d’un futur débarquement allié en France. »C’était allumer progressivement l’incendie derrière les lignes allemandes ». Cette stratégie prendra toute son efficacité après l’unification par Jean Moulin de tous les mouvements et réseaux de résistance du territoire français. Le patron du S.O.E. est le colonel Buckmaster. Pour le sud-ouest, l’agent local est Roger Landes dit Aristide, chef du réseau Actor. Il est issu d’une famille juive d’origine russe installée en Angleterre puis à Paris, diplômé des Beaux-Arts, formé en Grande Bretagne par le S.O.E. Il est parachuté dans le Gers en 1943. Il nomme Léonce Dussarat responsable pour les Landes et André Bouillar dit « Dédé le Basque » pour les Basses-Pyrénées.

 

2  L’action

Son but ultime : préparer les groupes en vue du débarquement allié.

Par les parachutages, Léon des Landes reçoit explosifs et armes qu’il peut cacher avant de les distribuer aux différents groupes.

Des instructeurs itinérants du B.C.R.A. et du S.O.E. forment un petit groupe de résistants choisis autour de Léonce Dussarat : ils enseignent techniques de clandestinité, du renseignement, des transmissions, du maniement d’armes et d’explosifs et de la guérilla. C’est ce premier noyau qui dépasse rarement l’effectif de 4 qu’intègre Michel Renaud (avec notamment Henri de Mesmay). Très vite, à son tour, il deviendra organisateur d’équipes plus larges pour entraîner, entreposer armes et munitions puis agir.

Début de l’action effective : fin avril 1944.

Des ordres écrits arrivent pour l’organisation de la guérilla, la création de nouveaux maquis lors du débarquement. Dès la réception des messages, Léonce Dussarat et sa petite équipe réunissent les troupes, distribuent armes et explosifs, organisent l’instruction sommaire et lancent embuscades et sabotages. Ces actions font toujours l’objet de comptes-rendus transmis à Londres et à Alger.

p1 certificat
Certificat agent P1.

Les missions précises de Michel Renaud en tant que «agent de liaison du chef départemental ; agent P1 du réseau n°54871.

  • Contact doussy
    Clé de reconnaissance.
  • Contacter divers responsables : Charles Lamarque-Candau, Henri de Mesmay, Joseph Doussy, le basque André Bouillar…
  • Entraîner de jeunes équipes aux sabotages ;
  • Choisir les terrains susceptibles d’être agréés par Londres pour recevoir les parachutages (à entreposer momentanément à la ferme de Libe) ;
  • Se procurer des vrais faux papiers, certificats de travail, cartes d’identité pour pouvoir mener à bien les différentes missions ;
  • Le 20 mai 1944, déménager de la ferme de Libe les explosifs et l’armement nécessaires pour équiper un groupe de 40 hommes qui devra agir le jour J.

Exemples d’actions de mai à août 1944.

  • 7 juin 1944 : deux jours de préparation militaire du groupe Renaud : 42 hommes. Déballage et préparation des armes sorties des containers : nombreux fusils, 1 bazooka, 1 fusil-mitrailleur, grenades et pistolets 9mm, détonateurs, plastic,
  • 8 et 9 juin 1944 : 4 groupes en opérations de sabotage ;

Lieux : route de Dax à Mées, voie ferrée Dax – Bayonne, route nationale Dax – Bayonne, route de la Pince à Magescq

Consignes : abattage des arbres, sabotage des voies ferrées, des liaisons téléphoniques (P.T.T. et S.N.C.F.), des câbles téléphoniques souterrains.

  • 9 juin 1944 : sabotage à partir de 1h du matin ; une patrouille allemande est déroutée après une escarmouche.

Retour des résistants dans leurs différentes caches.

  • 11 juin 1944 : destruction par les résistants eux-mêmes de la cache d’armes du maquis de Téthieu (près de la ferme de Libe) suite à une attaque des troupes allemandes.
  • Juillet août 1944 : sabotages divers de lignes électriques, téléphoniques, voies ferrées, dépôt d’essence de Saint-Paul-les-Dax.
  • Août 1944 : destruction dans « le secteur basque » d’un train partant de Saint-Jean-de-Luz vers le front de Normandie, transportant des pièces de marine à longue portée : ordre du S.O.E,

chef Aristide – agent Henri,

matériel : plastic, cordon, allumeurs et détonateurs fournis par un agent spécialisé,

du 1er au 3 août : transport de Dax au Boucau puis du Boucau au lieu de l’action,

5 août : préparation en gare de Bayonne (contact pour les horaires du train),

7 août : exécution de l’action, début 18h30, attente jusqu’à 20h10, explosion à 20h15.

8 au 10 août : exfiltration  de Michel Renaud via Bayonne et Dax.

  • 23 août 1944 : libération de Dax, Mont de Marsan et Bordeaux. Dans le comité de Libération, M. Renaud est officier d’ordonnance de Léonce Dussarat (Etat major de la région B).
  • les affectations militaires de la Libération.
laisser passer libération
Laisser-passer.

 

Affectation au bataillon des Landes avec participation aux combats de la Pointe de Grave en avril 1945,  avec le 34ième d’infanterie, Michel Renaud prend part aux combats de la poche de Saint-Nazaire, à la campagne d’Alsace et à l’occupation en Allemagne.

Renaud est libéré fin novembre 1945 promu sous-lieutenant de réserve, (lieutenant le 9 décembre 1948 et capitaine le 1er janvier 1955).

En rentrant M. Renaud est mis à la disposition des autorités départementales des Landes, il participe notamment aux Etats Généraux d’Avignon et à différentes missions jusqu’au ministère de la guerre à Paris.

 

9)  Epilogue.

A la fin de son récit, base de cette fiche, M. Michel Renaud éprouve un regret : «n’avoir pas su remercier ses amis, Résistants sans le savoir qui m’ont aidé par le gîte, le couvert, en me cachant, en me fournissant des faux papiers ».

Il témoigne aussi des liens qu’il a gardé après la guerre avec Léonce Dussarat (Léon des Landes) et Roger Landes, l’agent anglais du S.O.E, à propos duquel il raconte la rencontre avec le général de Gaulle qui lui dit : « Vous êtes anglais, vous n’avez rien à faire ici ».

Après la guerre, M.Renaud s’installe en Béarn, crée une famille, développe une entreprise de pâtisserie chocolaterie de haute renommée et milite pour l’organisation, la défense et la réputation de cet artisanat. Il porte aussi son témoignage auprès des jeunes en tant que membre du comité du concours de la Résistance et de la Déportation.

Courage, action, ambition des valeurs. Dans son métier, sa corporation, sa parole, M. Michel Renaud a su rester fidèle à ses engagements de jeunesse imposés par des circonstances exceptionnelles.

 

Décorations :

Légion d’Honneur, 1973.

Ordre national du Mérite, 1980.

Croix de guerre 39/45, 2 citations.

Médaille de la Résistance, 1 citation.

Croix du combattant volontaire 39/45, 1 barrette.

Croix du combattant.

Croix du combattant de la Résistance.

Interview de M. Renaud Michel.   Janvier 2013.

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interview plage 1

interview plage 2

interview plage 3

 

 

Diaporama: 

« Enquête sur la mémoire du maquis de Téthieu » réalisé par des élèves de terminale E.S. et S. du lycée Borda de Dax dans le cadre du concours national de la Résistance et de la Déportation. Année 2005 – 2006″. 

Accéder au diaporama.

 

Documents annexes:

Source: archives personnelles de M. Renaud.

Pièces d’identité. 

identité depaul    identité roy   certif travail depaul   certif travail marmajou

Preuves de reconnaissance.

certificat FFI
Certificat FFI
Croix combattant volontaire
Croix combattant volontaire
lettre em britannique
Lettre état major britannique.

Carte combattant volontaire

 

 

honneur et patrie

 

 

 

 

 

 

Citations militaires.

citation ordre régiment
Citation 1945
notification lieitenant
Notification grade de lieutenant 1945
citation médaille resistance
Citation médaille de la résistance 1956

 

 

 

 

 

 

 

Notes personnelles de M. Renaud.

le soe manuscrit
Le S.O.E.
messages bbc
Messages de la B.B.C.
mission 7 08
Plan mission du 7 août 1944

 

 

 

 

 

 

 

Les événements de Téthieux.

La mission du 7 août 1944 « pays basque »

Remise de la Légion d’Honneur.

Décoration à Gan.

Retour de Roger Landes « Aristide » en Béarn chez M. Maurice Plantier, alors Secrétaire d’Etat aux Anciens Combattants.

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Aristide
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Aristide, M. et Mme. Plantier
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Aristide et M. Renaud

 

 

 

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