Association  BPSGM          Les Basses Pyrénées dans la seconde guerre mondiale         64000 Pau

LAULHE Benoit. Résistances C.F.P. 58: LES PREMIÈRES OPÉRATIONS (JUIN 1944).

LES PREMIÈRES OPÉRATIONS (JUIN 1944).

 

Benoit LAULHE – La Résistance dans les Basses-Pyrénées – Master U.P.P.A. – 2001 –

Fiche n°58.

 

 

LES PREMIÈRES OPÉRATIONS (JUIN 1944).

           Suivant les différents plans élaborés avant le débarquement, les troupes du Corps franc Pommiès se mobilisent dès la diffusion des messages annonçant le jour J. Limités dans un premier temps par des problèmes de logistique, notamment d’armement, mais aussi de défection de volontaires, les différents groupements réagissent dans l’ensemble rapidement et se portent dans leurs zones d’action et près des objectifs.

            Dans les Basses-Pyrénées, aux premières heures de la mobilisation, une série d’opérations se réalisent avec succès. Il s’agit tout d’abord de regrouper et d’installer l’état-major du bataillon dans un lieu sûr. Plus active et surtout plus efficace, la section de destruction Mercier multiplie les attentats contre les lignes électriques et les voies de chemin de fer.

            Cependant, la phase la plus importante de la mobilisation concerne le regroupement des hommes en compagnies, ces dernières se positionnant dans plusieurs zones du département avec pour consignes de harceler l’occupant dans ses déplacements.

            Le 5 juin 1944, la B.B.C. diffuse dans son programme de messages personnels les phrases suivantes : « Véronèse était un peintre » et « Le père la cerise est verni » 1, annonçant respectivement l’alerte puis le déclenchement de la mobilisation des troupes du Corps franc Pommiès. Les plans de rassemblement et d’équipement étant minutieusement préparés, les jonctions d’unités dans les zones d’opération prévues se font sans grands problèmes. Cependant, quelques difficultés liées au manque d’armement et à la défection de volontaires sont à relever.

            Ce double problème a pour conséquence dans un premier temps de diminuer les effectifs disponibles pour la lutte. En effet, le manque d’armes tout d’abord ne permet pas de rendre actifs tous les hommes mobilisés et oblige plusieurs commandants d’unités à renvoyer une partie de leurs effectifs faute d’activité. Par ailleurs, le chef Pommiès estime à plus de 10 % la proportion de défections par rapport aux inscriptions enregistrées avant le 6 juin 1944.

            Ces différentes limites prises en compte, le C.F.P. se voit attribuer une mission particulière qui vise à « ralentir au maximum les déplacements terrestres de l’ennemi, sans destructions importantes du réseau ferroviaire et routier »2. Concrètement, les opérations doivent aboutir à l’interruption du trafic ferroviaire, au harcèlement et à l’anéantissement des déplacements de troupes ennemies et au blocage de toute communication. A ces actions stratégiques doivent également s’ajouter une série d’opérations de harcèlement visant à créer chez l’adversaire un sentiment d’insécurité et de méfiance constant.

            Dans notre département, cette mobilisation se concrétise de diverses manières. Dans un premier temps (dans la nuit du 5 au 6 juin) le chef de Carrère), les premiers éléments du P.C. et la section de protection quittent Pau pour une ferme de Maucor (au nord-est de Pau) où ils se mobilisent. Ce petit état-major ne reste toutefois que peu de temps dans ce cantonnement. Le 8 juin, le commandant décide en effet le départ et la nomadisation dans un rayon de vingt kilomètres au nord-est de Pau. Il circule ainsi de bois en bois jusqu’au 23 juin entre St Casstin, Higuères, Coslédaa, Lalongue et Abère.

            Cependant, cette mobilisation du bataillon des Basses-Pyrénées touche surtout les différentes compagnies présentes sur le terrain et prêtes à l’action : à partir du 6 juin, leurs objectifs et leurs zones d’action sont clairement définies :

– La compagnie Henry opère dans la région nord de Pau et avec la mission de harceler les axes Pau-Bordeaux (nationale 134) et Pau-Bayonne (R.N. 117).

– Au sud et au sud-est de la préfecture, Vernet et ses hommes doivent en faire de même sur les axes Nay-Tarbes et Nay-Pau.

– La compagnie Henry, basée sur Pau, doit s’occuper de la voix Pau-Tarbes (R.N. 111).

– Enfin, la compagnie Bèguerie, dite « de Soule », en position dans la région de Mauléon, doit harceler les différents axes menant à la zone interdite des Pyrénées.

            A côté de ces compagnies et de cet état-major, les plans de mobilisation du bataillon des Basses-Pyrénées prévoient la mise en place, mais surtout, l’action d’une section de destruction spécifique au département (il n’y en a normalement qu’une par groupement). Commandée par un jeune étudiant parisien, Mercier (dit Fri-Fri), réfugié à Pau mais instruit par le spécialiste des opérations de sabotage du C.F.P. (Amiot), cette section est sûrement celle qui se met le plus rapidement en action et qui applique le plus fidèlement les consignes des plans d’action.

            Ainsi, dès le 7 juin, Mercier et ses hommes (les principaux sont Bayoumeux et Latuste) concentrent leurs opérations sur les voies ferrées. Dans un premier temps, ils s’attaquent à la ligne Pau – Canfranc au nord de Gan, puis (le même jour) ils sabotent un passage à niveau sur la voie Pau – Bayonne à hauteur de Lescar. La nuit suivante, ils font sauter la voie Pau – Lourdes aux environs de Baudreix et le lendemain (le 9), ce sont dix pylônes en ciment supportant les câbles de traction électrique sur la ligne Pau – Canfranc qui s’écroulent. Ils réitèrent ainsi la même opération dans la nuit du 10 au 11 juin, mais cette fois avec moins de succès puisqu’aucun des quatorze poteaux de l’axe Pau – Bayonne (au niveau de Labastide-Cézeracq) ne tombe. Ils reviennent cependant le lendemain avec de meilleurs explosifs et mènent à bien leur mission. Toutefois, au-delà des cibles ferroviaires, l’autre grand objectif de Mercier et de sa section de destruction reste les lignes hautes tension Dax – Jurançon qui sont attaquées dans cette même ville. Cette opération est reconduite par la suite le 12 à Gan et le 13 à Jurançon.

             Ainsi, en l’espace d’une semaine, à peine, cette section réalise plus de destructions que tout le C.F.P. dans le département, pendant les années précédant le débarquement.

           Décisive par son élan et ses perspectives d’action, cette mobilisation des jours postérieurs au 6 juin révèle avant tout les forces, mais aussi les faiblesses des bataillons du C.F.P.. Laissant présager une action plus intense du gros des troupes, c’est à dire des compagnies, elle reste malgré tout dans l’histoire du C.F.P. une période à la fois charnière car incertaine, mais surtout vitale par l’importance et la symbolique des premières opérations lancées.

 

 

¹  Ceroni M. Le Corps Franc Pommiès, Toulouse, éditions du Grand Rond, 1980, 750p.

2 Idem

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