Association BPSGM Les Basses Pyrénées dans la seconde guerre mondiale 64000 Pau
Charnier du Pont-Long. Constat du médecin lors de l’exhumation. Août 1944.
Un médecin du Service départemental de la Santé a établi un rapport lors de l’exhumation des fusillés retrouvés dans les fosses du charnier du Pont-Long. Ce rapport est adressé au Préfet du département.
Transcription du rapport:
REPUBLIQUE FRANCAISE
Préfecture des Basses-Pyrénées Août 1944
Inspection départementale d’hygiène.
EXHUMATION DES CORPS DES MAQUISARDS
SUPPLICIES PAR LES ALLEMANDS ET ENTERRES
PRES DU CHAMP DE TIR ET DANS SON ENCEINTE .
Trois fosses ont été découvertes à l’extrémité sud du champ de tir ; une vers l’entrée nord.
Les trois premières se trouvent dans le touya à quelques mètres des fils de fer qui limitent le champ de tir ; on s ‘est efforcé de les camoufler en recouvrant la terre de touffes d’herbe et en plantant de petits arbres et des branches ; dans quelques mois, il n’y aurait plus eu traces de ces fosses. Actuellement, l’herbe s’est desséchée et la terre s’étant affaissée et craquelée, on voit nettement les bords des fosses. La première fosse ouverte a environ huit mètres de long sur deux mètres de large ; les premiers corps se trouvent à environ 0m80 de profondeur. Sur les corps, on note la présence de quatre troncs d’arbres de 0m25 à 0m30 de diamètre et de deux mètres de long environ ; ils présentent des traces de balles. Les corps ont été jetés pêle-mêle dans n’importe quelle position ; il y en a deux couches. Au total, vingt six cadavres dans la première fosse.
La deuxième fosse a environ 6m de long sur 2 de large. Le premier cadavre, en position assise, est découvert à 0m50 de profondeur ; la tête est défoncée comme par un coup de pioche. Tous les cadavres sont pêle-mêle ; peut-être plus encore que dans la première fosse ; j’ai l’impression qu’ils ont été massacrés sur le bord de la fosse. Cette fosse contient quinze cadavres.
La troisième fosse n’a que deux mètres de long sur 1m50 de large ; dans le fond ; à deux mètres de profondeur environ, sont alignés deux cadavres en meilleur état de conservation que les autres.
La fosse qui se trouve dans l’enceinte du champ de tir a été creusée dans un fossé déjà existant ; des paysans des environs y ont porté une charrette de terre afin de recouvrir les corps que les chiens venaient déterrer. Les cadavres se trouvent à peine à 0m30 de profondeur sous une couche de terre non tassée. Ils sont en état de décomposition avancée, surtout deux d’entre eux. Trois cadavres ont été attaqués par des animaux carnassiers qui en ont enlevé de larges morceaux. La fosse contient six cadavres .
Dans l’ensemble, les constatations suivantes ont été faites sur les corps : putréfaction assez avancée, cependant, les chairs sont encore adhérentes aux squelettes, les cheveux et les ongles adhérant également à la peau.
Presque tous les cadavres ont la bouche ouverte et la langue hors des arcades dentaires ; beaucoup présentent de fractures fermées des membres, surtout des membres supérieurs, d’autres ont le crane ou la tête fracassés par un instrument contondant ; chez plusieurs on note des ecchymoses au tiers inférieur des jambes , qui paraissent dus à des liens fortement serrés. Sept ou huit ont un bandeau sur les yeux. Chez presque tous on voit des traces de balles au niveau du cœur ou dans la tête. Lorsque la tête n’est pas trop écrasée, elle présente des marques d’une indicible souffrance.
Seule, une autopsie permettrait peut-être de se rendre compte si certains de ces suppliciés n’ont pas été enterrés avant la mort. (surligné lors de la transcription)
J’ajoute enfin que, sauf sur trois ou quatre d’entre eux, ont ne trouve rien permettant d’identifier les corps.
Le Médecin Inspecteur de la Santé
Mention manuscrite:rapport adressé à M. le Préfet.
Source: AD64 . Cote 1031W182
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