Association  BPSGM          Les Basses Pyrénées dans la seconde guerre mondiale         64000 Pau

Asson. Meurtre de J.B. Larquier. 26 juillet 1944. Procès verbal de la gendarmerie.

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Reproduction du procès verbal dressé par les gendarmes de la brigade de Nay, le 27 juillet 1944, constatant le meurtre de Larquier Jean-Baptiste, meurtre attribué à « des individus armés, vraisemblablement des terroristes ».

27 juillet 1944                                                                                Brigade de Nay
       Meurtre de Jean Baptiste Larquier par des résistants (26 juillet 1944).

 

Nous soussignés Larrigalot Jean, Gentil François, gendarmes à la résidence de Nay, ayant été prévenus à notre caserne par M. le maire d’Asson qu’un meurtre avait été commis dans la soirée du 26 courant sur la personne de M. Larquier Jean Baptiste, âgé de 70 ans, cultivateur dans ladite commune par des individus armés, vraisemblablement des terroristes, nous nous sommes rendus sur les lieux et nous avons fait les constatations suivantes :
Dans une prairie de la propriété Larquier, à Asson, attenante à la maison d’habitation, à 50m environ au sud de cette dernière, nous avons découvert le cadavre d’un homme âgé de 70 ans environ que nous avons reconnu pour être celui de Larquier J.B.. Il était couché sur le coté droit, la face tournée vers le sol, les jambes pliées en arrière, vêtu d’une chemise blanche, d’un veston gris et d’un pantalon de la même couleur. Il était chaussé de sabots, sans chaussettes, tête nue. Il porte derrière la tête une blessure paraissant avoir été occasionnée par une balle qui paraîtrait être sortie par l’œil droit. Deux autres traces de projectiles sont apparentes, l’une au dessus du sein gauche et l’autre à hauteur du poumon droit. Plusieurs taches de sang provenant de ces blessures paraissent sur le corps et dans l’herbe. Un fagot de cimes de maïs se trouve à 3m de la victime, laissant supposer qu’elle a été attaquée alors qu’elle rentrait du champ situé à proximité.
Mme Larquier, née Crouseilles Joséphine, 64 ans, ménagère, déclare :
« Hier soir vers 20h je me trouvais à la maison lorsque 3 individus sont entrés chez moi, armés de mitraillettes et de revolvers. Ils m’ont demandé où se trouvaient mes fils Marcel et Laurent. Je leur ai répondu qu’ils avaient quitté la maison depuis 8 jours et j’ignorais leur résidence actuelle. Sur ma réponse l’un d’eux m’a menacé de ses armes en disant « vous savez très bien où sont vos fils, mais vous ne voulez pas le dire. Je suis officier de la France Libre. Votre fils Marcel est un salaud, il a fait tuer beaucoup de monde ». Il m’a ensuite demandé où se trouvait mon mari ; après lui avoir dit qu’il se trouvait au champ à proximité de la maison, il est sorti avec l’un tandis que le troisième me gardait à vue dans la cuisine. Presqu’aussitôt j’ai entendu 2 ou 3 coups de feu à proximité de la maison. Peu de temps après ces deux hommes sont revenus à la cuisine rejoindre le troisième. Ils m’ont saisie et couchée à terre ; à l’aide d’une corde ils m’ont lié les jambes, les mains derrière le dos et bâillonné la bouche avec une serviette en disant « restez là, nous allons revenir ».Ils ont fouillé la maison prétextant qu’il y avait des armes et des papiers leur appartenant. J’ai constaté la disparition d’un billet de 500f et d’une paire de souliers à l’état neuf.
Par mes propres moyens, j’ai réussi à me dégager de mes liens et suis allée me réfugier chez mon voisin Cambot. En passant dans la prairie attenante j’ai aperçu mon mari, à 50m environ, couché sur le coté, la face contre terre. L’ayant appelé et ne me répondant pas, j’ai compris qu’on venait de le tuer. Je n’ai pas eu le courage de me rendre auprès de lui.
J’ai aussitôt prévenu mes voisins Com, Bernatas, Lafleur. Ces derniers n’ont pas osé se rendre sur les lieux. Ce n’est que ce matin à notre arrivée et en compagnie des voisins que je suis allée près de mon mari. J’ai remarqué qu’il avait plusieurs blessures sur le corps.
A mon avis, c’est l’individu qui se disait officier qui a dû tuer mon mari, car il était très surexcité.
Le 16 courant, dans la soirée, mon fils Marcel âgé de 35 ans, alors qu’il gardait les vaches dans notre propriété a été assailli et roué de coups par 2 individus armés qu’il n’a pas connu. Mon fils avait pris le maquis à un moment donné et s’en était retiré depuis quelque temps. Je n’ai jamais remarqué qu’il ait porté des armes ou des papiers provenant du maquis.
Je n’ai pas reconnu ces 3 hommes. J’ai remarqué que l’un d’eux était masqué, de taille moyenne, corpulence mince, vêtu d’un complet bleu foncé. Celui qui se disait officier était de taille moyenne, teint brun, nez aplati, je n’ai pas remarqué ses vêtements. Le troisième était de grande taille, corpulence mince, légèrement courbé. Ils étaient tous les trois pieds nus et paraissaient mouillés ce qui me fait supposer qu’ils avaient traversé la rivière située à 100m de ma demeure.
Mes fils Marcel et Laurent sont absents depuis plusieurs jours et j’ignore où ils sont. »
M. Cambot René, 36 ans, cultivateur déclare :
« Hier au soir vers 20 h. je me trouvais chez mon voisin Com, lorsque j’ai entendu 3 ou 4 coups de feu à proximité. Com est sorti dans son jardin d’où il a cru apercevoir M. Larquier couché dans son pré, ce qui lui a paru suspect. Il est allé aviser de cela M. Milon tandis que moi, je suis rentré chez moi où j’ai trouvé Mme Larquier affolée. Elle m’a dit que son mari venait d’être tué par 2 individus armés et elle-même ligotée et bâillonnée. Pour toute sécurité elle a passé la nuit chez moi. Vu l’heure tardive et la crainte de rencontrer les meurtriers, je n’ai pas osé me rendre sur les lieux. Ce matin en compagnie de mes voisins Com, Lafleur et Bernatas, je me suis rendu dans la propriété Larquier. Nous avons découvert le cadavre de ce dernier dans une prairie à proximité de sa maison. Il portait plusieurs blessures sur le corps.
Etat des lieux. La prairie où Larquier a été tué est située à 50m environ au sud de la maison d’habitation de la victime, à 4km environ au S.E. de l’église d’Asson, à 50m environ à l’ouest de la rivière dite « l’Ouzom » et à 80m environ à l’est du CD 126.
Etat-civil de la victime. Larquier Jean-Baptiste, cultivateur, né à Asson le 30 novembre 1874, fils de feu Jean et de Lahore Marie, marié, 10 enfants.
Certificat médical du 27 juillet. Je soussigné, Dr Lacq François, demeurant à Nay, déclare avoir été constater le décès de M. Larquier Jean-Baptiste, âgé de 70 ans, demeurant à Asson. L’examen du cadavre a révélé 3 plaies perforantes par balle de la région péri cardiale et de la région thoraco-pulmonaire gauche et une plaie pénétrante dans la cavité orbitaire gauche. La mort a été immédiate.

Source: archives de l’association.

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